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Des soutiens aux sans-papiers vont se constituer prisonniers

posté le 09/04/2009 par Michel Garcin - Lire l'article du Parisien

«Si la solidarité est un délit, je demande à être poursuivi pour ce délit. » Avec ce slogan pour cri de ralliement, des rassemblements se tiendront aujourd’hui devant les palais de justice et les préfectures d’une soixantaine de villes. Initié par une quinzaine d’associations (Réseau éducation sans frontières, Emmaüs…), ce mouvement a pour cible, à l’instar du film « Welcome », l’article de loi qui permet de poursuivre passeurs, trafiquants de main-d’oeuvre et tout citoyen venu en aide à un sans-papiers. D’après les associations, arrestations et placements en garde à vue de militants ou de travailleurs sociaux sont de plus en plus fréquents. Parents de trois enfants, Marie*, cadre dans une banque, et son époux Jules*, enseignant, tous deux 37 ans, se revendiquent « délinquants de la solidarité ». Symboliquement, ils vont se « constituer prisonniers » à Paris.

A quand remonte votre engagement ?

Marie. Au début de l’été 2006, au moment de la circulaire Sarkozy sur la régularisation des parents d’enfants scolarisés. C’est là que des familles sans papiers ont choisi de sortir de l’ombre. Dans l’école de nos enfants, à Paris, elles sont passées de deux ou trois au début du printemps à une dizaine à la fin. Or, cette circulaire s’est avérée une opération de communication, avec des quotas… Beaucoup de gens, répondant aux critères, sont restés sur le carreau et étaient menacés d’expulsion. A partir de là, on ne pouvait plus dire : « Je ne savais pas. »

Quelles ont été vos actions ?

Nous nous sommes formés sur le tas au droit des étrangers pour aider ces familles à constituer des dossiers administratifs. Nous en avons parrainé plusieurs et mobilisé les réseaux de solidarité chaque fois que l’une d’elles était arrêtée. Mon mari et moi avons hébergé durant plusieurs semaines des adolescents dont les parents avaient été placés en rétention. Le seul moyen d’éviter leur expulsion était de séparer les enfants et de les cacher… Cela valait le coup : cette famille, originaire d’Afrique de l’Ouest, a été depuis régularisée.

Saviez-vous que vous risquiez des poursuites ?

Oui, nous le savions. Nous avions restreint les invitations, faisions attention à nos communications téléphoniques et Internet. Que signifie, par exemple, cet objectif de 5 000 arrestations « d’aidants » fixé par le ministre de l’Immigration pour 2009 ?

Etes-vous militants ?

Non, ni associatifs ni politiques. Nous nous sentons plutôt de gauche mais des gens de droite partagent notre engagement. Ce qui nous lie, nous et ces familles, ce sont nos enfants. Les leurs sont nés ici ou arrivés très jeunes : ils sont les citoyens de ce pays. Pourquoi notre petit voisin vivrait avec la trouille au ventre parce que ses parents sont privés d’un bout de papier ? Oui, je ressens de la rage quand j’apprends que l’un d’eux a été arrêté ! Et je ne considère pas que je favorise l’immigration clandestine : ces gens sont là ! Nous les aidons à vivre dans des conditions normales.

Propos recueillis par Pascale Égré (Les prénoms ont été modifiés)

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